Jeudi 24 octobre
C’est à l’aube, avec des yeux encore endormis, que seize de nos étudiants du Master 2 Droit de la vigne et du vin se retrouvent pour entamer leur périple. Mais ce départ matinal est de rigueur : ils sont attendus. A 15h est prévue la visite du domaine des Sénéchaux, haut-lieu de Châteauneuf-du-Pape. La route s’est passée sans accroc, et nos étudiants sont arrivés au domaine en respectant le quart d’heure bordelais. Ou plutôt le quart d’heure Castel-Papal ? Ou Châteaunevois ? Laissons la territorialité de la coutume aux historiens du droit.
Nous avons été chaleureusement accueillis par le directeur technique, Bernard Tranchecoste, un homme qui semble faire partie des lieux ! Et à raison : il officie au domaine depuis 1998. Il nous a montré avec passion les superbes vignes où il travaille quotidiennement, et nous a raconté l’acquisition du domaine en 2006 par la famille Cazes.
La superficie du vignoble des Sénéchaux est de 27 hectares. Fidèle à Châteauneuf-du-Pape, l’encépagement est à dominante grenache, syrah et mourvèdre. Les méthodes de travail du Domaine des Sénéchaux restent traditionnelles : taille sévère, labours réguliers, vendanges en vert sur les jeunes vignes, tri rigoureux de la vendange, éraflage, longues cuvaisons, élevage en foudre, puis mise en bouteille de la totalité de la production. L’utilisation des machines est proscrite sur l’ensemble de l’appellation.

Nous avons eu la chance de goûter quatre vins :
- Domaine des Sénéchaux rouge 2017
- Domaine des Sénéchaux rouge 2010
- Domaine des Sénéchaux blanc 2018
- Domaine des Sénéchaux blanc 2009

Mention spéciale au dernier, dont la belle intensité au nez, mêlant les fleurs blanches et les agrumes avec un zest exotique, a conquis la promotion ! Son registre aromatique se poursuit en bouche, affirmant la minéralité du terroir.
A la suite de cette visite fort instructive, nous rentrâmes au gîte pour banqueter. Nous nous régalâmes de mets exquis, bûmes jusqu’à plus soif, et festoyâmes jusqu’à des heures indues.

Pourquoi cet emploi soudain du passé simple me demanderez-vous ? Nous accuserons l’ambiance médiévale de la cité des papes.
Vendredi 25 octobre
Après la courte nuit, les anges se réveillent peu à peu dans la villa. Branle-bas de combat, car aujourd’hui est un jour de fête.
C’est le congrès annuel de la section européenne de l’Association internationale des juristes du droit de la vigne et du vin (AIDV). Fondée pour promouvoir et développer le droit viticole à l’échelle internationale, l’AIDV a obtenu le statut d’observateur officiel à l’OIV et à l’OMPI. Elle s’attache à développer et comprendre tous les aspects du droit du vin par le biais de l’éducation et de la recherche, des publications, de débats et d’autres initiatives.
Le congrès a lieu au Palais des papes, dans le Cellier Benoît XII, avec tous les professionnels de la filière. Nos juristes se devaient donc d’être sur leur 31. Les cravates se nouent, les robes se zippent et le claquement des talons résonne.
Premiers arrivés sur les lieux, nous avons été accueillis par Me Desilets, qui était intervenu lors du colloque du 9 octobre sur les liens entre Droit du vin et Droit pénal.
Le congrès de ce jour avait pour thème « Du raisin au vin », et était divisé en trois grandes parties : les travailleurs, la valorisation du produit et la jurisprudence communautaire. Il faut saluer ici la qualité de l’organisation et des interventions, sur des sujets aussi variés que l’utilisation de la main d’œuvre étrangère, la transmission des entreprises viticoles, ou encore les arrêts marquants de la CJUE. Il est à noter que cette dernière thématique a permis à notre directeur, Ronan Raffray, de s’illustrer en répondant à des questions quant à la figure du consommateur moyen dans la vente de vin, et de sa comparaison avec le champ de la propriété intellectuelle (sujet de son intervention lors du colloque du 9 octobre précédemment évoqué). Quel showman !

Cette journée a également permis à nos étudiants en Master 2 Droit de la vigne et du vin (a.k.a M2 DVV pour les initiés) de rencontrer leurs homologues en Master 2 Droit du vin et des spiritueux de l’Université de Reims (a.k.a. M2 DVS pour les intimes). Ils se retrouveront à Reims pour le Moot Court du 9 et 10 mars 2020 !
Après cette journée de conférence, nos étudiants ont déambulé dans la cité médiévale, pour admirer le pont Saint-Bénézet, et certain(e)s se sont même risqué(e)s à danser dessus !

Une fois tous rentrés au gîte, le programme fut assez similaire à la veille. La raison est simple : on ne change pas un programme qui gagne.
Samedi 26 octobre
Réveil plus doux pour nos colocataires d’un week-end. Le devoir appelle certains de nos étudiants qui partent les premiers, et la maisonnée s’en trouve réduite de moitié.
Pourtant, le programme de la journée n’en est pas moins faste :
- Visite de Château La Nerthe
- Balade au château de Châteauneuf-du-Pape
- Pique-nique à l’étang salé de Courthezon
- Visite du domaine biodynamique Le Sang des Cailloux
- Dégustation au Cellier des Princes
- Visite improvisée au domaine de Beaurenard
En bref et en images.
Nous avons commencé avec la visite du Château La Nerthe. Domaine somptueux, mais surtout des caves splendides ! Le vignoble du Château La Nerthe est une mosaïque de 57 parcelles sur lesquelles on retrouve les 4 grandes familles de sols de Châteauneuf-du-Pape et les 13 cépages de l’appellation. Le domaine est cultivé en agriculture biologique (certification ECOCERT) depuis 1998. Les vignes occupent 92 hectares dont 60 autour du Château et 32 à quelques centaines de mètres plus à l’Est sur le fameux plateau de la Crau. L’ensemble de ces parcelles couvrent la totalité de la diversité des sols de l’appellation faisant du style de La Nerthe l’expression entière de la complexité de Châteauneuf-du-Pape.

Nous avons été reçus par Madame Nadeige Vidé, responsable commerciale clientèle particulière du Château La Nerthe. Elle fut notre guide lors de la visite des chais, puis nous a honoré d’une dégustation de vins produits au domaine.

C’est l’ancien propriétaire, Serge Férigoule, qui nous a accueilli au domaine Le Sang des Cailloux. Serge Férigoule est un homme proche de la terre, authentique et haut en couleur. D’appellation Vacqueyras contrôlée, c’est la mise en œuvre de la biodynamie qui nous a intéressé chez ce vigneron. C’est une biodynamie familiale qui est mise en place dans ce domaine de 17 hectares, bien loin des gros domaines de Châteauneuf-du-Pape. De la viniculture à taille humaine en somme.


Enfin, dernière visite surprise au domaine de Beaurenard. La totalité du vignoble de Beaurenard (60 hectares) est en culture biologique (ECOCERT) et même cultivée en biodynamie (certifié par Demeter), sans utilisation de produits chimiques de synthèse. Ainsi la vigne est en phase avec la nature, les cycles lunaires, planétaires et les rythmes cosmiques . Pour les vins rouges, 4 cépages dominants : Grenache, Syrah, Mourvèdre, Cinsault, complétés par Counoise, Muscardin, Terret noir et Vaccarèse. Les blancs sont issus de cépages blancs : Clairette, Roussane, Bourboulenc, Grenache blanc, Picardan et Picpoul. La moyenne d’âge des vignes est d’environ 45 ans avec un rendement, à Châteauneuf, variant de 15 à 35 hl/ha. Contrairement au Domaine le Sang des Cailloux évoqué précédemment, c’est une biodynamie à plus grande échelle qui s’applique ici. Des chais magnifiques avec des équipements de pointe, pour être au plus proche de la nature.

Pauline visiblement très fière de son pull
Encore une journée éreintante pour nos étudiants, qui, fatigués par le cumul des jours et les dégustations à répétition, ont préféré se calmer pour cette dernière soirée. C’est donc devant une soirée film que nos juristes ont finalement trouvé leur repos.
Excellente conclusion du séjour en Avignon !
Au nom de tous les étudiants du Master 2 Droit de la vigne et du vin, je tiens à remercier :
- Le Domaine des Sénéchaux, le Domaine le Sang des cailloux, le Château La Nerthe, le Domaine de Beaurenard et le Cellier des Princes de nous avoir chaleureusement accueilli, et gracieusement, qui plus est !
- L’Association internationale des juristes du droit de la vigne et du vin d’avoir organisé cette très belle conférence annuelle ;
- L’association Intermillésimes d’avoir pris en charge l’inscription au congrès.
Article rédigé par Louis Salles